Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Réflexions piquantes d'une jeune romaniste
8 janvier 2008

Je n'aime pas le changement.

Voici une phrase que je répète souvent, presque par habitude, comme une ritournelle : « Je n’aime pas le changement ! » Pourquoi ? Parce que le changement signifie dépaysement et réadaptation.  Et, on a beau dire, ce ne sont pas des choses faciles, quel que soit l’âge.

Tour_astronomique_151Je ne le cacherai pas : mes débuts à Padoue furent fort difficiles. Presque du jour au lendemain, je suis passée à un tout autre rythme de vie. Choyée par mes parents, incapable de me faire cuire un œuf, n’ayant jamais fait une lessive, je devais désormais apprendre à vivre toute seule. Mais il n’y a pas eu que la découverte de l’autonomie ; j’ai été tout à coup arrachée à ma famille, à mes amis, aux visages familiers et rassurants pour le plonger dans une ville où je ne connaissais strictement personne. Je devais me débrouiller dans une langue que je ne maîtrisais guère – certes, l’italien n’est pas le finnois, un francophone peut intégrer assez rapidement les notions de base ; mais allez-y pour faire des démarches administratives ou partir à la recherche d’un logement dans la langue de Boccace quand vous n’êtes pas fichus de le faire en français. Il me fallait adopter un autre mode de vie : me coucher tard – très tard – tout en continuant à me lever tôt, négliger la ponctualité et, surtout, apprendre à communiquer, autrement dit, à engager la conversation avec une foule d’inconnus car, sur dix personnes qui nous laisseront de glace, il y en aura une que avec qui nous aurons envie de faire plus ample connaissance.

Peu à peu, Padoue et son train de vie ont cessé d’être « exotiques » : je m’y suis sentie chez moi. Les rues, les visages, les habitudes, la langue (pas encore tout à fait) sont devenus familiers. Mieux : non seulement, je me sentais chez moi mais je m’y plaisais et je ne voulais quitter cet endroit pour rien au monde.

Mais voilà, les vacances de Noël sont arrivées et je suis retournée à la maison. J’ai ressenti alors quasiment le même dépaysement qu’il y a trois mois et demi lorsque j’ai dit au revoir à Maman sur le quai de la gare. C’était ma famille, c’était ma maison, les changements y étaient minimes – un répondeur téléphonique, de nouvelles paires de lunettes pour mes deux parents, une couverture beige posée sur mon lit – mais je ne me sentais plus chez moi. Et pour cause : je me suis rendu compte que, durant tout ce temps, la vie avait continué sans moi. Bien sûr, je le savais, je recevais régulièrement des nouvelles de la maison. Mais il y a une différence entre savoir et ressentir. Il a fallu retrouver mes marques, reprendre possession de ma maison – ce qui, concrètement, a signifié faire comprendre à ma sœur que le confortable fauteuil devant la télévision était à moi, même si elle se l’était approprié durant plus de trois mois ; en un mot : se réadapter.

Depuis samedi, je suis de nouveau à Padoue. Et tout est à refaire. Je suis arrivée dans un appartement vide, sous un ciel gris, avec mes amies encore chez elles ou occupées à étudier. Le sentiment de solitude que j’avais ressenti à mes débuts à refait surface. Mais je ne m’inquiète pas : avec l’expérience, j’ai compris que le dépaysement n’était qu’une impression passagère. Espérons qu’elle passera bientôt.

Image : C’est la tour astronomique de Padoue, l’un de mes endroits préférés ici. Un soir, tandis que j’inaugurais une longue série de raccompagnements en voiture, j’ai soudain débouché sur une place presque au pied de cette tour. La nuit était noire ; la tour, fantomatique. J’ai été éblouie. Je me suis juré de revenir en plein jour à cet endroit. Le dimanche suivant, qui était une belle journée ensoleillée, j’ai fait une longue balade pour retrouver cette tour. L’endroit était magnifique avec ses maisons donnant sur le canal, ses canards et sa barque de pêcheurs, avec ses écluses, ses petits ponts de pierre et sa tour médiévale. J’y suis souvent retournée : ce lieu m’apaise.

Publicité
Publicité
Commentaires
Réflexions piquantes d'une jeune romaniste
Publicité
Réflexions piquantes d'une jeune romaniste
Publicité